HaÏro -rappeur sous haute tension

Aujourd’hui, je vous invite à découvrir Haïro, un jeune rappeur parisien dont les textes et la personnalité m’ont frappé en plein cœur. Il gravite lui aussi autour de la planète Parisian Spirit. Percutant, sensible, mystérieux et sombre, Haïro balade ses mots sur des prods affutées, avec une douceur apparente qui en dit plus long sur ses tempêtes intérieures que de longs discours. Il s’est pourtant confié à moi dans une longue interview avec une grande et sincère générosité. Haïro est à n’en pas douter un rappeur qui va compter dans les mois et années à venir. Ses univers et ses planètes sont multiples mais on a très envie de graviter autour et de se laisser embarquer dans ses mondes. Il y a du Nekfeu dans son flow et la douce influence de Nepal dans sa façon de balancer ses états-d’âmes. Une poésie évidente. Canal 27 est son premier album, réalisé avec Valentin Larbre, le comparse de Louis dans le duo Oulmerie dont je vous ai déjà parlé. Deux sensibilités qui se sont bien trouvées. Il se passe décidément beaucoup de choses passionnantes dans ce studio, et je n’ai pas fini de vous en parler. En attendant, je vous embarque avec moi à la rencontre de Haïro.

De quelle planètes viens-tu?

Je ne suis pas sûr de venir d’une seule planète. L’univers d’où je viens est beaucoup trop grand pour le réduire à une seule planète. J’ai dû passer d’une planète à une autre dans une autre vie et j’ai dû m’imprégner de toutes celles que j’ai vu. Je me sens très détaché du monde. Je suis un solitaire par dépit.

Quel est ton parcours?

J’ai quitté l’école tôt, j’ai déménagé plusieurs fois, j’ai changé de quartiers souvent et de milieux sociaux aussi. J’ai un peu bifurqué par rapport à mes potes vers un monde plus ouvert. Je déteste ce qu’on m’apprend, si on m’apprend trop un truc, je vais le détester. J’ai envie de faire mes expériences tout seul. Je n’aime pas les frontières qu’elles soient dans la tête ou physique.

D’où viens ton pseudo?

Mon prénom c’est Rafael et mon pseudo Haïro veut dire gris en japonais. On m’a parfois dit que j’étais quelqu’un d’assez gris. Je ne suis pas neutre, j’ai des avis sur beaucoup de choses mais je comprends toutes les positions qu’elles soient extrêmes ou pas. J’ai finalement l’esprit de contradiction mais je respecte les avis des autres. Je ressens un vrai détachement par rapport à ce que les gens pensent de moi. Haïro ça me définit bien parce que finalement je n’ai pas encore trouvé ma planète. Je suis observateur mais j’ouvre aussi ma gueule quand il faut.

Pourquoi as tu choisi le rap comme moyen d’expression?

J’ai commencé à écrire des histoires sans forcément être dans la musique et puis un jour j’ai découvert le rap avec Doc Gynéco quand j’avais 8/9 ans. Je suis tombé amoureux direct. Il y a aussi une facilité de la langue dans le rap. Je trouve ça très compliqué de faire du rock, alors que mes influences sont plutôt rock à la base. J’ai surtout écouté Nirvana à cause de Kurt Cobain. Mais aussi Eminem, Linkin Park, Kiss et Mötley Crüe. Des personnalités atypiques, solitaires, excentriques aussi. J’aime beaucoup Metallica mais aussi de la variété française comme Julien Doré, Gainsbourg, j’adore les comédies musicales.

Est ce que tu joues un instrument de musique?

J’ai fait du piano pendant 4 ans quand j’étais très jeune, après j’ai fait un an de guitare au conservatoire juste pour avoir mon premier diplôme et après j’ai arrêté. Je compose pas trop en fait, j’ai fait quelques prods sur l’ep mais co-réalisé avec Valentin. Je suis plus passionné par l’écriture que la musique en fait. C’est une mathématique qui me fait chier plus que tout. Je peux pas rester devant un ordinateur. J’ai juste envie d’écrire et de rapper. Aujourd’hui, je suis vraiment dans ce délire, de me poser, tout seul, de me concentrer et travailler, analyser le texte. C’est pour ça que j’utilise le terme « mathématique ». Il y a la mathématique de la composition et celle de l’écriture.

Pourquoi as-tu appelé ton album « CANAL 27 »?

27 parce que c’était le numéro de la maison où je vivais dans la rue de la station. Je déteste le mot station, c’est moche. Du coup j’ai cherché un synonyme de ce mot et j’ai pensé à la radio, du coup le mot canal s’est imposé. C’est mon canal à moi.

Si tu devais définir ton album en un mot?

Besoin. C’était quelque chose que j’avais besoin de faire plus qu’envie. C’est aussi une présentation de moi parce que c’est très personnel surtout pour un premier projet dans le rap. Généralement le 1er c’est très ego trip, on montre ce qu’on sait faire et dans les suivants, on montre qui on est. Après ça dépend des rappeurs, Lomepal ou Roméo Elvis se sont beaucoup livrés tout de suite. L’idée de cet album est né dans ce studio en fait. A force de venir bosser avec Valentin, l’idée a trouvé son chemin. Canal 27 est très lié au départ d’une maison qui a été très importante pour moi. Je l’ai assez mal vécu parce que je suis très attaché aux endroits où je vis. J’ai vécu longtemps dans le 20 ème et j’ai besoin d’y retourner régulièrement.

As-tu prévu des clips pour cet album?

Oui pour le titre « Dernière nuit », ça devrait être le seul du projet. En fait, cet album je l’ai balancé comme ça, j’avais envie de m’en libérer. J’ai pas eu de stratégie particulière.

Tu parles beaucoup d’amour dans cet album?

Oui, d’amours contrariés. Chez moi tout est sombre (rires).Même quand je réécoute l’album, j’me dis qu’il a morflé ce mec et c’est moi en fait.

Pour le prochain projet, tu as décidé de le sortir différemment?

En fait avec Canal 27, j’ai bouclé une boucle, je me suis prouvé que j’étais capable de le faire. Maintenant, j’ai une vision plus professionnelle de la suite.

Quels sont les prochaines étapes de ton développement?

J’ai des vidéos qui sont et vont sortir avec NéonAir. On a tourné deux lives avec des nouveautés. C’est la première fois que les gens vont vraiment me découvrir. Jusqu’ici, j’ai posté quelques photos de moi sur mon Instagram, mais personne ne me connaît vraiment. Il y aura aussi le clip de « Dernière nuit ». Je vais aussi faire une série de vidéos sur Instagram toutes mises en scène. J’aimerai les sortir de mi-juillet à septembre pendant la période des vacances. Et puis à la rentrée, repartir sur un EP.

Quel est ton rapport à la scène?

Pour l’instant, je n’ai eu qu’une expérience. J’ai fait Super Rap avec Parisian Spirit et j’ai été très très étonné par le public, je pensais pas que ma musique pouvait rendre autant fous les gens. Après ce que j’ai fait à Super Rap, c’était pas les morceaux de Canal 27. C’était beaucoup plus festif. La scène me fait peur parce que les gens t’envoient beaucoup d’amour. J’ai envie d’être aimé mais c’est aussi flippant. Mais ça évolue. Il y a une différence entre faire Super Rap et faire ton propre concert, parce que les gens ne viennent pas te voir toi en particulier. Du coup, ça met une grosse pression.

Sur ta scène idéale on trouve qui?

Oulmerie! Après je suis très passionné par un rappeur américain qui s’appelle Yelawolf qui mélange, rock, rap, country. Il était dans le label d’Eminem. J’écoute beaucoup de choses, par contre je ne suis pas fan de musique festive.

Dans ta loge idéale, on trouve quoi?

Oulmerie encore une fois, pas mal de bouquins d’auteurs comme Laurent Gounelle qui a écrit « L’homme qui voulait être heureux ». Pour moi c’est mon livre de référence. Mais en vrai, il n’y aurait pas grand chose.

Es-tu un grand utilisateur des réseaux sociaux?

Oui mais forcé. Je suis surtout sur Instagram. Mais ce sont des outils indispensables. J’ai pas encore le réflexe de m’en servir quand je vis un truc.

Comment as-tu vécu le confinement en tant qu’artiste?

Très mal, ça été une énorme souffrance. Je suis quelqu’un qui a besoin de voir la vie, je suis un contemplatif amoureux de la poésie du monde capable de rester devant un coucher de soleil. Niveau inspi, au début ça été, mais après ça a commencé à tourner en rond, parce qu’il n’y avait pas fin. Ça m’a surtout empêché d’aller faire de la musique parce que je ne le fais qu’à l’extérieur.

Quelle est la difficulté principale que tu as rencontré dans la musique jusqu’ici?

L’argent forcément, mais surtout se faire des contacts. Comme je suis un solitaire, c’est ce qu’il y a de plus difficile.

Le temps vient de s’arrêter, tu peux choisir un moment qui a changé ta vie?

Quand j’ai quitté le vingtième pour le 94. Tout a changé pour moi, il n’y avait plus d’immeuble, mais des maisons, beaucoup de verdure. J’ai changé complètement d’environnement social aussi, et j’ai eu l’impression de rentrer dans le monde c’est là que j’ai compris que le monde était vaste.

Je t’emmène sur Mars, tu emmènes quoi ou qui avec toi?

Le livre de Laurent Gounelle, mais aussi un manga Deathnote qui pour moi est le meilleur parce qu’il fait réfléchir. C’est un salaud qui est en même temps un héros. C’est là que tu comprends la vraie définition « d’être gris ». J’aime beaucoup la gymnastique intellectuelle que demande la lecture de ce manga. . J’emmènerai aussi une salopette (rires) parce que c’est encore avec ce genre de fringue que je suis le plus à l’aise!

Crédits Photos: Estelle Clément

Retrouvez Haïro sur ses réseaux sociaux et dans sa dernière presta pour Neonair

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